Lorsque j’ai franchi la 24e semaine de grossesse, je me suis sentie tellement soulagée. Désormais, mes bébés étaient viables, s’il arrivait une quelconque situation exigeant un accouchement.
C’est le cœur à la fête que je me présente à mon suivi de grossesse.
Mais par malchance, j’ai affaire à Dr. Panique à ce rendez-vous…
Elle m’explique d’emblée que c’est loin d’être gagné, même que je m’apprête à traverser la période la plus critique de ma grossesse. S’il était advenu un pépin avant 24 semaines de grossesse, pour elle, ça aurait été un moindre mal : les bébés seraient tout simplement morts. Mais là, s’ils se décident à sortir dans les prochaines semaines, c’est ben du trouble (risque élevé de morbidités diverses pouvant les affecter à long terme).
Cette réalité crue me plonge dans un état d’esprit à des kilomètres de la fête…
Je me suis inscrite à des cours d’aquaforme prénatale, qu’en pense Dr Panique? Vraiment pas une bonne idée : dans ce genre de cours, on sautille sur place, les bébés risquent de faire une pression sur mon col et potentiellement me mettre en travail. De plus, début septembre, c’est la rentrée scolaire, et ce genre d’endroit grouille d’enfants porteurs de millions de germes : si j’attrape un rhume, avec ma situation pulmonaire déjà précaire, on risque de m’hospitaliser. Selon elle, je devrais occuper mon temps à me bercer dans les prochaines semaines. Bref, ne pas trop bouger.
Je sors de ce rendez-vous complètement démoralisée, moi qui commençais à croire réelles mes chances de rencontrer mes bébés un jour, elle remet un doute dans ma tête et remet bien en place toutes les craintes que je nourris depuis le début de ma grossesse.
De plus, je suis complètement frustrée d’être réduite à ne rien faire de mes journées. Je comprends les enjeux, et je ne veux pas mettre en péril la vie de mes bébés. Mais de voir chéri travailler d’arrache-pied sur les rénos de la maison et de ne pouvoir y participer me démoralise. En plus, chaque fois que je tente d’aider, il me rappelle les enjeux (lui aussi a peur des conséquences possibles de mon hyperactivité) et me demande de rester tranquille.
Entre vous et moi, je vis une autre frustration, celle de ne pas me faire dire d’en faire moins lorsqu’il est question de tâches ménagères. Cette remontrance, j’ai l’impression qu’elle n’est valide que pour les activités que j’ai vraiment envie de faire.
Je commence à constater que je ne vis pas cette grossesse sereinement. Toujours dans l’angoisse, la peur et la frustration. Même si je l’ai désirée plus que tout, j’ai de la difficulté à être bien dans mon corps et dans mon esprit.
Quand j’en parle à mon entourage, j’ai l’impression qu’on me sert des phrases vides du genre : bein non, fais-toi en pas, ça va bien aller. Ce que j’entends quand on me dit ça : « Tu t’inquiètes pour rien la grosse, t’as pas raison de te sentir comme ça, fais juste apprécier la chance que tu as d’être enceinte, berce-toi et arrête de te plaindre. »
Cet épisode de ma vie m’aura au moins appris une chose sur les relations d’entraide et d’écoute. La personne qui te confie quelque chose NE VEUT PAS NÉCESSAIREMENT AVOIR TON OPINION! Elle veut simplement se sentir écoutée, et se faire dire qu’elle a le droit de vivre ce qu’elle vit.
Les histoires de grossesse de mes amies semblent n’être que des histoires de bien-être et de bonheur face à cette vie qui grandit en elles. Moi je me sens mal, je n’aime pas la grossesse (ou plutôt la peur constante qu’elle me fait vivre), je n’aime pas les restrictions que ça m’impose, et mon corps évolue tellement vite avec 2 bébés.
Je culpabilise de penser comme ça…Mais je garde ça pour moi, je me sens tellement ingrate d’avoir ces pensées-là…